La station du Super Saint-Bernard et celle du Furggen ont repris vie grâce à deux projets de master en architecture. Entre réaffectation minimaliste et écologique, ces études interrogent l’avenir de ce patrimoine architectural qui défigure parfois la montagne.
Faillite, changement climatique, manque de neige et d’investissement… De nombreuses stations de sport d’hiver dans les Alpes suisses sont laissées à l’abandon. Quatre étudiants de master en architecture de l’Ecole Polytechnique fédérale de Lausanne ont fait le pari de réhabiliter deux installations de remontées mécaniques. Ils leur ont consacré leur travail de diplôme.
Avant de choisir la région du Furggen, Yannick Guillermin et Sacha Rey ont contacté quelque 400 communes possédant du terrain au-dessus de 1500 mètres d’altitude. Ils ont évalué le potentiel d’une cinquantaine de bâtiments abandonnés.
Ils se sont finalement penchés sur la revitalisation de la station du Furggen, près de Zermatt, sur la frontière italo-suisse. Point d’arrivée du téléphérique, à quelque 3500 mètres d’altitude, la station a été conçue par l’architecte italien moderniste Carlo Mollino, connu pour ses constructions en montagne. Elle est abandonnée depuis 1992.
La vue imprenable sur le Cervin, la qualité de sa construction et sa galerie couverte ont convaincu de son grand potentiel. La flore de haute montagne étant menacée par le changement climatique, ils ont transformé la station en banque de graines florales alpines. «Nous proposons de construire sept frigos sous la galerie, directement dans le permafrost. La température annuelle varie entre -1 et 1 degré, l’idéal pour la conservation de graines florales», explique Sacha Rey. Les étudiants ont souhaité conserver les murs d’origine. ” Il ne faut pas oublier qu’à l’époque, c’était une prouesse de construire en haute montagne. Nous pensons donc qu’il faut garder des traces de cet exploit et mettre en valeur ces ruines». Le téléphérique du Furggen reprendrait donc vie avec un laboratoire, une bibliothèque, un espace d’exposition et un gîte de huit lits.
A l’entrée du tunnel du Grand-Saint-Bernard, un autre projet de réaffectation de station alpine a pris forme. «Nous voulions intervenir de manière écologique et économique, proposer une sorte de projet-témoin de réhabilitation de station de montagne», explique Loïc Schaller, auteur du projet de master aux côtés de Lisa Robillard. La station qui abritait la gare de départ du téléphérique est abandonnée depuis sa mise en faillite il y a six ans.
Le projet propose d’accentuer les activités sportives en offrant aux randonneurs, cyclistes et amateurs de peau de phoque un vrai lieu de rencontres et de dépôts pour leur matériel. L’espace comporterait un restaurant et un musée dédié à la construction du tunnel du Grand-Saint-Bernard. Ce musée serait intégré à l’offre culturelle de la région, à l’instar de la Fondation Gianadda et de la Fondation Barry, à Martigny.
«Les stations de ski ne peuvent plus compter sur la seule saison hivernale pour être rentables. Nous avons donc voulu présenter les options qui s’offraient à elles pour étendre leurs activités le reste de l’année, précise Loïc Schaller. Les travaux que nous proposons sont minimalistes et peu gourmands en énergie grise. Au final, nous voulions démontrer qu’il est plus rentable de réhabiliter ces bâtiments que de les détruire.» «Il n’y a pas que les anciennes stations de ski à exploiter, ajoute Sacha Rey, mais aussi les anciens bunkers de l’armée, les cabanes de montagnes, les barrages abandonnés et bientôt, à l’heure de la fibre optique, les infrastructures liées aux antennes téléphoniques.»
