Le Festival a connu dès, la première journée, dès la première après-midi, la fréquentation qui caractérise les rendez-vous confirmés, fidèles à une volonté de rigueur et de curiosité. Eric Fournier, nouveau maire de Chamonix n’a pu que se féliciter de la solidité de la manifestation qui entre dans l’offre culturelle de la ville, tout en restant fidèle à sa tradition de ville pionnière. Depuis plus de deux siècles, Chamonix est une ville de savants, d’hommes qui vont aux limites.
Cette année, le Festival de Chamonix s’est intéressé à la question de l’identité, l’identité sous toutes ses coutures, l’identité qui semble la plus solide, la plus définitive, comme l’identité qui semble la plus fragile, l’identité culturelle. Le thème a été abordé, examiné, enrichi lors de conférences mais aussi d’ateliers.
Le ton a été donné d’emblée jeudi Ier mai, dès la présentation de Jean-Marc Milhomme, l’un des organisateurs du Festival terminée. Trois spécialistes ont donné leur point de vue sur la notion d’identité, c’est-à-dire que leur discipline leur permettait de dire de l’identité.
Michel MORANGE, professeur de biologie à l’ENS et à l’Université Paris 6, philosophe des sciences est directeur du Centre Cavailles d’histoire et de philosophie des sciences de l’ENS a rappelé que nous ne pouvons être réduits à nos gènes. Nos gènes permettent de nous identifier, de dire que nous ne sommes pas un autre, mais ils ne disent pas tout ce que nous sommes. « Les gènes sont comme la palette de couleur pour le peintre, ils sont indispensables, mais ne permettent pas à eux seuls de réaliser une peinture». Michel Morange a souligné en particulier l’importance des phénomènes épigénétiques, qui se produisent autour des gènes, par leur interaction, comme par les modifications que les gènes peuvent subir lors de la reproduction de nos cellules. Nous ne sommes jamais complètement identiques à nous-mêmes.
Reconnaître le soi
Mais qu’est ce qui nous différencie des autres ? Comment notre corps identifie-t-il ce qu’il peut admettre, ce qui ne remet pas en cause son fonctionnement, et comment apprend-il à rejeter ce qui n’est pas lui ? Edgardo D. CAROSELLA, membre correspondant de l’Académie des Sciences et Membre de l’European Academy of Sciences, médecin, Directeur de Recherche au CEA, rappelle que cette fonction de reconnaissance qui nous protège, est remplie par les lymphocytes, des cellules (HLA, human leucocytes antigène) antigènes des leucocytes humains, capables d’identifier des cellules étrangères et de les supprimer. Ces lymphocytes sont porteurs de récepteurs qui leur permettent de reconnaître les cellules étrangères, mais aussi d’admettre les cellules non étrangères, qui elles ne doivent pas être rejetées. Ces lymphocytes sont formées dans plusieurs lieux du corps mais c’est dan le thymus qu’elles achèvent leur « formation », pour être aptes à rejeter précisément des corps étrangers ou pour en accepter certains.
La reconnaissance de soi chez les primates
La troisième approche de l’identité abordée lors de la rencontre d’ouverture, a permis d’évoquer les subtiles différences qui séparent plusieurs espèces de primates et l’homme. Jim ANDERSON, psychologue à l’Université de Stirling (Ecosse), travaille sur les primates non humains. Il a travaillé à l’Université Louis Pasteur de Strasbourg, s’est intéressé à la manière dont plusieurs espèces de primates réagissent lors de tests construit pour déceler des comportements exprimant la conscience de soi.
Confrontés à un miroir, certains primates, comme les macaques, ne se reconnaissent pas. Ils ne voient dans l’image qu’un congénère avec lequel ils peuvent avoir des relations d’agression. D’autres singes, en particulier les plus grands, surtout s’ils ont été éduqués dans un certain environnement, sont capables de non seulement d’utiliser un miroir, mais aussi de monter qu’ils ont compris que c’étaient eux qui se reflétaient. Une expérience particulièrement intéressante montre en particulier des singes sur lesquels une tache a été faite. L’animal sujet de l’expérience, réalise que la tache se trouve sur son corps, qu’elle y est un élément inhabituel, étranger, et ils essaient de la nettoyer.
Des expériences ont été réalisées avec des dauphins, des éléphants. Il semble bien que la reconnaissance de soi , existe dans une certaine mesures chez ces espèces. La frontière entre espèces, pour l’identité, n’est peut-être pas exactement aussi simple qu’on le croit. Les enregistrements du festival peuvent être consultés sur le site de ce dernier.
1) Michel Morange, a une double activité, scientifique (biologie moléculaire et cellulaire, biologie du développement), historique et philosophique. Il s’intéresse aux transformations des sciences du vivant au XXe siècle. Il est l’auteur des « Secrets du vivant » (La Découverte) et « Qu’est-ce que la vie 50 ans après la double hélice » (Odile Jacob)
2)Edgardo Carosella, est aussi chef du Service de Recherches en Hémato-Immunologie, à l’Institut Universitaire d’Hématologie à l’Hôpital Saint-Louis et Vice-président du Centre d’Etude du Polymorphisme Humain. Il est l’auteur de L’identité ? Soi et non soi (Puf) et a participé à L’identité : qui suis-je ? (Le Pommier).
http://festival.chamonix-mont-blanc.fr/programme/programme.html