Drosophila suzukii est un ravageur majeur des cultures fruitières, par exemple des cerises en région lyonnaise. En Europe et aux Etats-Unis l’utilisation de guêpes parasitoïdes s’es
t révélée in
efficace. Des chercheurs du Laboratoire de biométrie et biologie évolutive de Villeurbanne et de l’unité Ecologie et dynamiques des systèmes anthropisés d’Amiens, ont montré que des femelles D. suzukii déposaient leurs œufs sur la belladone qui diffuse un insecticide naturel qui protège les larves face aux parasitoïdes. L’étude est publiée dans Scientific Reports.
Femelle de Drosophila suzukii en train de pondre à l’intérieur d’une fraise. ©UMR5558 Théotime Colin.
Arrivée en Europe il y a un peu moins de 10 ans, Drosophila suzukii y cause des dégâts importants sur plusieurs cultures de fruits rouges telles que les fraises, les cerises et les raisins plus récemment. A la différence des drosophiles autochtones attirées par les fruits pourris ou fermentés, la femelle de D. suzukii attaque les fruits frais et mûrs ce qui occasionnent des dégâts import
ants aux récoltes. Les larves se développent à l’intérieur des fruits ainsi rendus impropres à la vente. S’appuyant sur l’utilisation de guêpes parasitoïdes ennemis de ces mouches des fruits, la lutte biologique est inefficace.
En tentant d’identifier le réservoir naturel de D. suzukii chez les plantes sauvages de France, des universitaires et de chercheurs du CNRS a sans doute découvert l’une des raisons de cet échec.
Parmi la soixantaine de baies sauvages analysées, les scientifiques ont eu la surprise de trouver des larves de D. suzukii dans les baies de belladone. Or, les fruits de
belladonne contiennent de l’atropine,substance toxique pour les insectes. « Un comportement d’automédication visant à prévenir les attaques de guêpes parasitoïdes par l’absorption d’éthanol a déjà été identifié chez une autre espèce de drosophile, nous avons voulu vérifier si D. suzukii utilisait l’atropine avec des conséquences similaires », précise Emmanuel Desouhant, professeur au Laboratoire de Biométrie et Biologie Evolutive (LBBE) et cosignataire de l’article.
Les chercheurs ont testé l’effet protecteur de l’atropine sur des larves de D. suzukii en laboratoire. Ils ont placé une population de larves sur un milieu enrichi en atropine et une seconde population sur un milieu témoin sans atropine. ‘équipe Les individus développés en présence d’atropine résistaient davantage aux attaques de leurs ennemis naturels.
Les scientifiques se sont rendu compte que les femelles déposaient plutôt leurs œufs sur un milieu contenant de l’atropine dès lors que des parasitoïdes étaient présents. « Bien que le développement des larves au contact de l’atropine allonge la durée de développement des larves et augmente la probabilité qu’elles soient parasitées par une guêpe, ce risque est compensé par un taux de survie plus élevé lorsque ce parasitisme survient en présence d’atropine », souligne Patricia Gibert, coauteure de l’étude et directrice de recherche au CNRS.