Les prochains Etats Généraux de l’Eau en Montagne qui se tiendront les 22, 23 et 24 septembre à Megève (Haute-Savoie), ont pour ambition d’attirer l’attention sur la nécessité d’anticiper les conséquences du changement climatique dans les montagnes européennes et de proposer des mesures d’adaptation indispensables.
Les zones de montagnes couvrent 35% du territoire européen: Alpes, Pyrénées, Carpates, alpes Dinariques, Tatras, etc. Dans des régions vivent 94 millions. Les montagnes sont déjà parmi les premières victimes du changement climatique. La température moyenne des Alpes a augmenté en un siècle de plus du double du réchauffement terrestre global, soit de + 1,5°C à 2,0°C . L’augmentation moyenne de la température à la surface de la Terre a été de +0,74 à + 0, 81 °C et celle de l’Europe de +1,2°C. Les modèles projettent une augmentation de température dans les Alpes d’ici à 2100 comprise entre + 2,6 et + 3,9°C. Le réchauffement pourrait être significativement plus élevé en haute montagne pour atteindre + 4,2°C au dessus de 1.500 mètres.
Recul visible des glaciers
Les conséquences du réchauffement sont déjà visibles sur les glaciers. Les glaciers alpins ont déjà perdu entre 20 et 30% de leur volume depuis 1980. Ils pourraient encore régresser de 30 à 70% de leur volume d’ici à 2050. Quasiment tous les plus petits glaciers auraient alors disparus ! Les glaciers des Pyrénées ont perdu 80% de leur surface depuis 1850 et ceux des Alpes 40% en moyenne. Les langues glaciaires remontent en altitude de 60 à 140 mètres pour seulement une augmentation de + 1°C de température.
Régime changé sur les grands fleuves
Avec la diminution de l’enneigement et la fonte des glaciers, les régimes hydrauliques de tous les grands fleuves européens, venant des montagnes, se modifient. En moyenne on observerait d’ici 2100 en plaine une augmentation de + 20% des débits en hiver, mais une réduction de -17% au printemps et jusqu’à – 55% des débits en été . Tous les grands fleuves européens, Ebre, Rhône, Pô, Rhin, Danube, Vistule, Save, Garonne…et leurs principaux affluents prennent leur source en montagne. Ils ont un régime principalement nivo glaciaire caractérisé par des précipitations sous forme de neige pendant la période froide, permettant une limitation naturelle des écoulements et donc des inondations en automne et en hiver. La régime est aussi marqué par un déstockage pendant la période chaude, avec la fonte des neiges et des glaciers qui ,alimenter les étiages estivaux, principalement en aval, dans les grandes plaines européennes.
Les montagnes apportent aujourd’hui une contribution essentielle aux débits de tous ces grands fleuves européens, de 34% du débit annuel total du Rhin, 41% de celui du Rhône jusqu’à 53% du débit du Pô, soit en moyenne de 2 à 6 fois plus que leur surface relative par rapport à celle de chacun des bassins. Ainsi par exemple, même si seulement 11 % du bassin du Rhin se trouve dans les Alpes, celles–ci assurent donc 34 % du débit annuel, mais surtout plus de 50 % du débit en été, lorsque l’eau est particulièrement demandée notamment par les agriculteurs irrigants et que les précipitations sont faibles.
Répartition différente des précipitations
Le total annuel des précipitations ne devrait pas varier beaucoup mais leur répartition saisonnière sera fortement modifiée. Les précipitations tomberaient devantage en hiver et au printemps sous forme de pluie qui ruisselleraient et non pas sous forme de neige stockée. En été, les précipitations seraient en fort recul. Les débits des grands fleuves de régime nivo-glaciaire seront sensiblement modifiés : en moyenne on observerait d’ici 2100 une augmentation de + 20% des débits en hiver, mais une réduction de -17% au printemps et jusqu’à – 55% des débits en été, surtout au Centre et au Sud des Alpes. On sait depuis plusieurs années que le régime de l’Isère, du Rhône, de la Durance seraient fortement affectés. Le niveau des aquifères pourrait aussi baisser de – 25% dans les Alpes du Sud.
La fréquence et l’intensité des inondations en automne, hiver et printemps, ainsi que des sécheresses estivales augmenteraient. Les autres conséquences du changement climatique en montagne seront une forte érosion, des glissements de terrains, entrainant de gros charriages de sédiments, une dégradation de la qualité des rivières et une augmentation de la température de l’eau.
La compétition entre les usages de l’eau se fera plus vive, notamment avec la généralisation de la production de neige de culture si elle était développée par les 666 stations de ski alpines actuelles pour assurer le maintien de leur clientèle. Il est indispensable d’identifier très rapidement ces changements et leurs conséquences, bassin par bassin, et d’initier d’ores et déjà les programmes d’actions nécessaires pour s’adapter en amont, comme dans les plaines en aval, en temps utile.
Le congrès qui se tiendra à Mégève sera l’occasion de dresser la liste des actions à entreprendre.