Roissy 4, le nouvel aéroport prévu pour la plateforme parisienne ne verra pas le jour. C’est évidemment une nouvelle énorme qui marque non seulement une inflexion dans les perspectives du transport aérien, mais aussi potentiellement une réorganisation géographique de ce dernier et une véritable décentralisation aérienne.
La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, a annoncé il y a une semaine dans les colonnes du Monde, l’abandon du projet Roissy 4. C’est le réalisme qui a prévalu. Le projet n’avait jamais, malgré sa dimension symbolique et ses effets environnementaux, mobilisé des mouvements écologistes, ni suscité la création de ZAD (Zone à Défendre).
Valérie Pécresse d’abord
Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France avait la première demandé l’abandon du projet. Devant l’effondrement conjoncturel, et la remise en question durable du trafic aérien, elle avait clairement pris position dès le mois d’août 2020, en plein débat public. « Comment imaginer un débat public éclairé alors que le trafic aérien est totalement effondré pour plusieurs années ? Comment susciter des échanges apaisés alors que l’avion est devenu un symbole de controverse écologique ? C’est pourquoi j’appelle aujourd’hui l’État et ADP à arrêter ce projet du T4 pour prendre le temps de repenser le monde aérien de demain. Il ne s’agit pas de prôner la décroissance et d’abandonner toute ambition pour Roissy, ce qui ne conduirait qu’à déplacer les long-courriers dans les aéroports des pays voisins en sacrifiant nos emplois. Mais nous devons en revanche accepter de revoir notre modèle de croissance permanente d’un trafic aérien trop bruyant et polluant. »
L’abandon de Roissy 4 est un acte de réalisme et de responsabilité. Il met sur la table les enjeux qui sont aussi des enjeux de décentralisation du système de transport. À coup sûr, Roissy 4 aurait été une énorme pompe aspirante, contraignant encore davantage d’usagers de l’avion à faire le détour par Roissy, comme c’est déjà souvent le cas.
Une économie importante
Roissy 4, c’était une dépense estimée entre 7 milliards et 9 milliards d’euros, soit l’équivalent de la dépense du tunnel de base Lyon-Turin. La comparaison vaut pour l’enveloppe globale. Mais du côté de Roissy 4, les incertitudes étaient grandes, la réalité l’a montré. La pandémie a mis en lumière la fragilité du transport aérien. La construction du futur terminal devait être supportée largement par Aéroports de Paris, société dont l’État est actionnaire majoritaire, sans aide européenne. Le fardeau devait être supporté par la France seule. Le tunnel de base de la liaison Transalpine ne sera supporté par la France qu’à hauteur d’environ 2,5 milliards, l’Italie et surtout l’Europe portant l’essentiel de la dépense.
Un nouveau projet plus écologique
Le groupe Aéroports de Paris (ADP) devra présenter un nouveau projet «plus cohérent avec ses objectifs de lutte contre le changement climatique et de protection de l’environnement », a annoncé au Monde la ministre de la transition écologique, Barbara Pompili. « Nous aurons toujours besoin des avions, mais il s’agit d’être dans une utilisation plus raisonnée de l’aérien, et d’atteindre une baisse des émissions de gaz à effet de serre du secteur », poursuit-elle. Le futur projet devra intégrer l’amélioration des infrastructures pour augmenter l’intermodalité avec le train pour favoriser l’accès par le rail à Roissy, et non par des vols intérieurs. La géothermie devra chauffer l’ensemble de l’aéroport et réduire sa consommation énergétique. Enfin, l’aéroport devra intégrer des avions à hydrogène ou électriques, alors que le plan de relance investit 1,5 milliard d’euros pour un avion neutre en carbone d’ici à 2035.