Quels sont les progrès accomplis par les sciences de la Terre depuis trente ans ?
On était très ignorants sur les 700 premiers millions d’années de l’histoire de la Terre, formée il y a 4,5 milliards d’années. Il y a une trentaine d’années, on découvrait dans les premières fumerolles noires, l’existence de bactéries capables de vivre près de sources chaudes à grande profondeur. Cette découverte a contribué à donner une nouvelle impulsion à l’étude de l’histoire de la Terre dans de nouvelles directions et il y a encore aujourd’hui, avec une meilleure connaissance de la géochimie, de l’histoire des roches, de très grands progrès qui sont réalisés.
Comment les sciences de la Terre se sont –elles développées à Lyon ?
Guy Aubert, premier directeur de l’Ecole Normale Supérieure de Sciences de Lyon, a cherché des secteurs dans lesquels il y avait à construire un pôle nouveau, en faisant bénéficier les chercheurs des moyens nécessaires. Les sciences de la Terre ont largement bénéficié de la décision de Guy Aubert de favoriser leur implantation dans l’école. Yves Allègre qui était conseiller de Lionel Jospin, voulait faire bouger l’Ecole Normale Supérieure de Saint Cloud en la faisant déménager à Lyon. Le déménagement était évidemment difficile, aussi il était plus envisageable de construire du neuf. Guy Aubert a voulu me faire venir, comme il a fait venir Philippe Gillet et plusieurs autres chercheurs, comme Yannick Ricard, Stéphane Labrosse, Pascal Allemand.
Comment le Laboratoire des Sciences de la Terre a-t-il assis sa réputation?
Le laboratoire des Sciences de la Terre a produit des travaux importants, comme ceux de Maud Boyer, aujourd’hui à Clermont Ferrand, qui a montré pour ainsi dire que la Terre était née fondue, qu’elle était à ses débuts une boule de lave. Mais il a fallu aussi comprendre comment s’est mise en place une tectonique des plaques, les autres planètes du système solaire ne connaissant pas ce phénomène. Nous avons pu déterminer les étapes de cette histoire en nous appuyant sur l’étude des isotopes des différentes roches.
Quelles sont les découvertes plus récentes ?
Nous avons compris par exemple depuis dix ans que le manteau n’était pas constitué de deux couches très différentes, mais que des échanges avaient lieu entre les différents niveaux du manteau. Aujourd’hui il existe à Lyon un pôle qui figure parmi les plus solides en France.
Tout cela a été possible car nous avons bénéficié d’équipements très puissants. Nous avons reçu le premier spectromètre de masse au début de 1994, le second est alors arrivé à Tokyo trois mois plus tard et nous allons bientôt installer un nouveau spectromètre de masse qui permettra de maintenir le haut niveau des recherches.
Recueilli par Michel Deprost
