Dans la nuit du 8 juillet à 6h30 du matin, à l’intérieur de l’usine SOCATRI située dans le site du TRICASTIN ( BOLLENE, Vaucluse), un rejet accidentel d’effluents uranifères de 30 m3 s’est produit pendant une opération de nettoyage d’une cuve. Un déversement a eu lieu sur le sol et dans le canal adjacent.
Ces effluents contenantt 12 grammes d’uranium par litre, se sont écoulés pour partie
jusqu’aux rivières La Gaffière et L’Auzon. Il s’agit de 18,07 m3 contenant 12 g d’uranium par litre (et non pas de 30 m3), soit 224 kg d’uranium naturel. La part d’uranium restée sur le site étant évaluée à 150 kg, ce sont finalement 74 kg qui se sont écoulés jusqu’aux deux rivières
Le préfet de Vaucluse, informé par l’Autorité de Sûreté Nucléaire d’un risque évalué faible
pour la population, a interdit la consommation d’eau potable issue de captages privés sur les communes de Bollène, de Lapalud, de Lamotte-du-Rhône. Il a décidé de stopper l’irrigation agricole issue de La Gaffière et de l’Auzon; d’interdire les activités nautiques et la baignade sur les plans d’eau du Trop-Long, du Baltraces (Bollène) et des Girardes (Lapalud). L’arrêté préfectoral interdit la pêche et la consommation de poissons dans la Gaffière (y compris partie amont située dans la Drôme), l’Auzon, la Mayre Girarde, le Lac du Trop-Long.
Taux d’uranium inférieurs à la norme
Pour les eaux de surface (non destinées à la consommation humaine), les taux d’uranium
sont « restés très supérieurs à la normale mais ont fortement diminué, par dilution, dans la
journée » du 8. Le préfet a demandé à l’exploitant le maintien et le renforcement de la
surveillance de la qualité des eaux superficielles et souterraines. Seront contrôlés dans
les prochains jours -pour les eaux de surface, 8 points situés en aval de SOCATRI. Ces contrôles seront étendus jusqu’au Rhône et complétés par les contrôles de la qualité des eaux des 3 plans d’eau précités (toutes les 3 heures). Pour les eaux souterraines, seront contrôlés les points habituels de contrôle du site de Tricastin (piézomètres), ainsi que 5 points de forages privés (2 fois par jour).
Les résultats des prélèvements réalisés sur les plans d’eau du Trop-Long, du Baltraces
(Bollène) et des Girardes (Lapalud), ne montrent, toujours selon la Préfecture, aucune contamination par l’uranium. Ils contiennent microgrammes par litre, ce qui est conforme à la normale. Les cent baigneurs évacués du plan d’eau des Girardes n’ont donc subi aucune contamination.
Mesures ce mercredi matin
Ce mercredi, des mesures ont été réalisées sur les eaux de surface, non destinées à la consommation humaine (cours d’eau de la Gaffière, de la Mayre Girardes et du Lauzon, plans d’eau du Trop-Long, du Bartraces et des Girardes) . Les points de mesure en dehors du site, jusqu’au Rhône, sont au nombre de 12. Mardi à 22 heures, le point maximal de concentration a été relevé à 90 microgrammes d’uranium par litre, ce qui reste 45 fois ” supérieur à la normale”, selon la Préfecture, mais en forte diminution par rapport aux valeurs de la matinée du 8 juillet. Les résultats des prélèvements de ce matin restent en attente. Les mesures réalisées sur les eaux souterraines (piézomètres du Tricastin + 3 forages privés) indiquent que tous les résultats sont inférieurs à 2,4 micro-grammes par litre, donc conformes à la normale, selon la préfecture.
Inspection de l’autorité de Sûreté Nucléaire ce jeudi
L’usine SOCATRI intervient en support des installations nucléaires du site du Tricastin en réalisant, notamment, des opérations de maintenance de matériels contaminés par de l’uranium et de traitement d’effluents uranifères. L’ASN réalisera une inspection jeudi 10 juillet pour déterminer notamment les causes précises de cet événement et d’examiner les mesures mises en place par l’exploitant.
La CRI-RAD ( Commission de Recherche et d’Information INdépendante sur la Radioactivité, basée à Valence) commente l’incident dans un communiqué en rappelant que l’utilisation de l’unité de masse au lieu de l’unité de mesure de l’activité (le becquerel) ne rend pas compte de l’ampleur de la fuite. Il est utile, selon l’association, de comparer le rejet accidentel aux limites annuelles que doit respecter la SOCATRI.
Pour la CRIRAD ce rejet représente une violation de la limite annuelle de rejet En prenant l’hypothèse d’un rapport isotopique naturel (soit 0,7% d’uranium 235) et de l’absence d’uranium artificiel (ni uranium 236 ni uranium 232), l’activité massique correspondant à 12 grammes par litre est d’un peu plus de 307 000 Bq/litre soit pour 30 mètres cubes d’effluents ( le rejet effectif est de 18 m3), une activité totale en uranium de plus de 9 000 000 becquerels, soit 9 200 MBq (mégabecquerels).
L’association rappelle que l’arrêté du 16 août 2005, impose à la SOCATRI ne doit pas rejeter sur un an, dans le canal de Donzère-Mondragon, plus de 71,7 MBq en isotopes de l’uranium. L’entreprise a donc dépassé, estime l’association, 100 fois la limite de rejet autorisé.
Aux termes de l’arrêté du 16 août 2005, la limite d’activité volumique des isotopes de l’uranium dans les effluents après traitement doit être inférieure à 50 Bq/l. Toujours sur la base d’un rapport isotopique naturel et de l’absence d’isotopes artificiels, l’activité massique des effluents serait d’environ 300 000 Bq/l, soit un dépassement de plus de 6 000 fois la limite réglementaire. La CRIIRAD demande la communication immédiate des résultats d’analyse détaillés par radionucléide.
Enfin l’association commente la communication des autorités.
« Il est intéressant de remarquer que lorsqu’une fuite accidentelle se produit et qu’elle est inférieure, ou très inférieure, aux limites de rejet, cette comparaison est systématiquement mise en avant par l’exploitant et l’Autorité de sûreté nucléaire et l’Etat. En revanche, lorsque la fuite représente un dépassement considérable (plus de 100 fois et plus de 6 000 fois) des limites maximales, la comparaison disparait du discours officiel et les résultats sont présentés… en grammes !» explique l’association.