Comment aller chercher des grumes dans des massifs forestiers pentus, mal desservis par des routes forestières, dans des milieux où le forestier est mal compris d’un public de vététistes, de pratiquants du 4×4, de randonneurs, et de chasseurs?
C’est le défi principal de la forêt de montagne, qui est pourtant une ressource de taille pour les départements alpins. ” La demande de bois, matériau et énergie renouvelable, croit au niveau mondial » Jean Jacques Verney, directeur de COFORET, l’une des principales coopératives forestières françaises.
La forêt alpine doit surmonter toute une série d’obstacles que les innovations techniques permettent de dépasser, comme cela a été évoqué lors d’une journée consacrée à ce thème dans le cadre des premières Assises du Développement durable en montagne, organisées à Chambéry ce jeudi et ce vendredi 28 et 29 avril.
La desserte des massifs forestiers est une condition essentielle, pour développer une exploitation qui perturbe le moins possible le milieu. Or,tout n’a pas été fait dans ce domaine,dans les Bauges par exemple où une nouvelle route forestière a été construite sur le territoire du Chatelard.
La première solution consiste à créer des routes, c’est à dire des voies accessibles non seulement à des tracteurs mais aussi à des poids lourds et à des grumiers. Comme au Chatelard, la création de routes peut être aidée par l’ Europe, par l’ Etat. Évidemment les projets se heurtent à des obstacles. « Il faut passer beaucoup de temps à convaincre chacun des propriétaires, explique Guy Viard Cretat, expert de l’Office National des Forêts. Il s’agir de faire comprendre qu’une meilleure desserte permet d’aller chercher des bois nouveaux et d’améliorer la valeur des bois. « Avec les aides, le retour sur investissement peut être de seulement trois ans au lieu de 17″. Une vision globale
« Il est indispensable d’avoir non pas une vision étroite, à l’échelle d’une coupe, mais une vision au niveau d’un massif. Une route est structurante » explique Marc-Jean Robert, responsable de l’Unité forêt-filière bois au Conseil général de la Savoie.
Il s’agit d’aménager des routes en tenant compte des capacités accrues de l’exploitation par câbles qui permet aujourd’hui de tirer des arbres sur plus de 1000 mètres, sans pénétrer dans la forêt avec des engins. Le câble permet d’éviter les coupes rases.
L’aménagement doit prendre en compte les usages multiples d’une nouvelle route forestière. Elle servira à exploiter davantage de bois, mais elle trouvera aussi d’innombrables autres usages.Itinéraire de VTT, de randonnée pédestre,piste de ski de fond ou de raquette, retour de piste de ski, espace nouveau pour la chasse, voie ouverte pour le pastoralisme, desserte agricole: la voie financée par la collectivité, mais aussi par les forestiers, sera largement utilisée. Les forestiers, entreprises de travaux, bucherons risquent même de ne plus pouvoir travailler sans risque pour les autres usagers. Ils risquent d’être incompris.La prise en compte des conflits d’usage est primordiale et l’information des publics est essentielle.
Transporteurs
Mais il ne faut pas oublier les conditions des travailleurs de la forêt. En particulier celle des transporteurs de bois. Les routes doivent être aménagées pour permettre l’accès aux grumiers capables de charger 57 tonnes, dont 35 tonnes de bois. Les routes doivent être solides, résister à l’érosion grâce à des renvois d’eau qui permettent au ruissellement de franchir la voie sans l’endommager. Plûtot que des tranchées qui déstabilisent les véhicules et les cassent, il faut mettre en place des renvois d’eau en bois ou métalliques.
L’innovation pourrait consister à diversifier les bois sortis des forêts. Aujourd’hui, les scieurs achètent des grumes, des bois longs qu’ils préfèrent sélectionner et couper ensuite chez eux. Sortir de forêt des billons plus courts assouplirait le transport. C’est une piste pour améliorer l’exploitation de la forêt.
Michel.deprost@enviscope.com