La toxine du maïs Bt MON 810 est la même que celle qui est utilisée en agriculture biologique

La France est une grande utilisatrice de pesticides, avec 78600 tonnes de substances actives vendues en 2008 dont 90% pour l’agriculture avec 30 M ha de surfaces cultivées et 10% pour des usages non agricoles pour les routes, les voies ferrées, les espaces verts, les rues, le jardinage, les locaux. La France est le premier producteur européen de produits phytosanitaires.

Les céréales à paille, le maïs, le colza et la vigne occupent moins de 40% de la surface agricole et utilisent près de 80% des pesticides. Les grandes cultures sont moins dépendantes des pesticides chimiques que les « petites ». Les grandes cultures offrent des marges de rotation que n’offrent pas les petites surfaces avec des cultures permanentes.

Mais de 1999 à 2008, la baisse de l’utilisation de chaque type de pesticide et donc de la quantité totale a été significative, avec un passage de 120 000 t  à 80 000 tonnes pour simplifier.

Cela est-il constaté au niveau international ?

Selon l’ECPA (European Crop Protection Association) les doses moyennes de produits phytopharmaceutiques utilisées à l’hectare ont entre 1950 et 2000 été divisées par plus de neuf, passant de 1,3 kg à moins de 150 grammes par hectare. Dans le même temps, l’indice de sécurité (DJA) a été en moyenne multiplié par cinq.

En France où pas ou peu de cultures biotechnologiques ont été cultivées quelques variétés de maïs porteuses de l’événement de transformation MON810 ont été utilisés pendant quelques années. Ce n’est pas l’utilisation de maïs Bt GM pendant quelques années qui a eu un impact. On utilisait des pesticides avant les PGM, on en utilise toujours lorsqu’elles existent.

Cependant l’utilisation des PGM permet-t-elle de réduire les quantités  de pesticides ?

Seules les quantités d’insecticides peuvent diminuer pour les plantes génétiquement modifiées résistantes à un insecte donné. Pour les plantes tolérant un herbicide donné, on voit logiquement une utilisation supérieure, multipliée par deux de l’herbicide total (car utilisé en pré- et post-levée), le glyphosate que la plante est capable de tolérer. Mais cette augmentation est compensée par une diminution des autres herbicides sélectifs qui ont de manière générale un profil toxicologique bien plus mauvais que le glyphosate.

Où les cultures biotechnologiques en sont-elles ?

Les différents rapports annuels « Brookes and Barfoot » (1) font le bilan de l’utilisation et de la culture des PGM dans le monde. Les travaux qui s’appuient sur des méta analyses de travaux essentiellement publiés dans des revues à comité de lecture, arrivent à une conclusion générale selon laquelle les PGM ont entrainé une diminution globale des quantités de produits de défense des cultures.

L’impact des diverses matières actives sur l’environnement n’est pas le même. Dans le cadre d’un programme sur la gestion intégrée des parasites, des chercheurs de l’université de Cornell, ont établi un coefficient tenant compte de nombreux paramètres qu’ils ont appelé :  Environmental Impact Factor (EIQ).

Ce coefficient est appliqué aux différents produits de protection des cultures utilisés en culture conventionnelle ou avec les PGM. Dans tous les cas, même lorsque la quantité de matière active a augmenté du fait de l’usage de PGM, l’empreinte environnementale a toujours diminué, au niveau mondial de 20,4% pour le soja TH (tolérant aux herbicides) et de 4,6% pour le maïs TH et de 5% pour le maïs RI (résistant aux insectes) et de 24,6 % pour le cotonnier RI. De plus, la diminution des épandages d’insecticides a un impact positif sur la faune non cible !

Qu’en est il aux USA ?

Selon un bilan de dix ans réalisé, aux Etats-Unis les agriculteurs utilisent généralement moins d’insecticides quand ils plantent du maïs Bt et du cotonnier Bt.

Globalement qu’il s’agisse de maïs Bt ou pas, les producteurs de maïs ont diminué leur consommation de pesticides de 9% en 2010. L’utilisation d’insecticides sur les exploitations de maïs a donc diminué de 235g/ha en 1995 à 23g/ha en 2010. Ceci est cohérent avec la baisse régulière des populations de pyrales du maïs au cours de la dernière décennie suite à l’adoption des PGM Bt. La mise en place d’exigences minimales de refuge avec la plantation d’environ 20% de plantes conventionnelles entourant la plante Bt, a contribué à retarder l’évolution de la résistance au Bt. L’apparition de résistances serait, dans tous les cas, parfaitement normale et conforme à ce que l’on a toujours observé en amélioration variétale.

Quelle est la présence de toxine dans les plantes Bt ?

Dès 1990, B. Ames a publié  un article intitulé « Dietary pesticides, (99,99% all natural) », Pesticides et alimentation : 99,99% des pesticides naturels).

Ce titre, très concis, est explicite. Il signifie que sur 10 000 pesticides que nous mangeons, 9999 sont naturellement contenus dans l’aliment et le dix millième est un pesticide de synthèse.

Cela veut dire concrètement que notre ration alimentaire ne contient que 0,01% de pesticides de synthèse. Tous les autres sont naturellement contenus dans les plantes et donc dans notre ration alimentaire. Simultanément, cela veut dire que tous les organismes vivants sont « pesticides » ou « à pesticides » selon une formule créée par les antis-OGM. Les PGM n’ont aucune spécificité et ne sont pas plus des « plantes pesticides » que leur contrepartie non-GM.

Des pulvérisations de Bacillus thuringiensis sont utilisées en tant qu’insecticide même en Agricuture biologique. On connaît maintenant plus de 250 toxines Bt distinctes et on sait que les pulvérisations de Bt contiennent plus qu’une seule toxine. Il a été montré que la quantité de toxine pulvérisée est équivalente à celle présente dans une PGM donnée.

La toxine Bt s’accumule-t-elle dans les plantes modifiées ?

La toxine présente dans une PGM donnée ne s’accumule pas dans la plante. En effet, lorsqu’elle est dosée dans différentes parties de la plante et à différents moments de la culture, les quantités observées sont constantes. On constate également des valeurs identiques entre année et lieu de culture. Non seulement, la toxine présente dans une PGM Bt donnée ne s’accumule pas mais elle est simultanément dégradée et exsudée par la plante. Chez certaines PGM Bt, les méthodes ne sont pas suffisamment sensibles pour détecter la présence de la toxine dans le grain de pollen. Pour conclure, ce rapport Brookes and Barfoot signale que les quantités utilisées d’insecticides avec les PGM Bt ont notablement diminuées.

Hermann Höfte, directeur de recherche à l’Inra de Versailles, a travaillé sur ces protéines CRY. Il confirme aussi cette teneur d’environ 10 µg/g dans les feuilles ou différents organes de la plante. Lorsqu’on dose cette protéine au cours du temps, au cours de la croissance de la plante, les valeurs restent les mêmes ! Ce qui veut dire que la protéine est détruite au fur et à mesure de sa synthèse par le catabolisme cellulaire. Rien n’est prévu, en effet, pour qu’elle s’accumule ou se retrouve dans quelques compartiments (organites) de la cellule.

Qu’arrive-t-il à la mort de la plante ?

Evidemment, à la mort de la plante, après la récolte, avec l’enfouissement des « pailles », la protéine se retrouve potentiellement dans le sol soit par exsudation soit par destruction (lyse, décomposition) des tissus par l’humus. La protéine ne fera que s’ajouter aux nombreuses autres protéines présentes de la plante et, plus spécifiquement aussi, à toutes les toxines produites par les bacilles de Thuringe naturellement présents dans la plupart des sols. Les toxines  subiront le même sort que toutes les autres protéines présentes dans un sol !

On connaît plus de 250 protéines CRY mais d’autres toxines sont connues notamment de la famille CYT, environ une trentaine. Aucune autre toxine que celles qui sont trouvées dans les PGM n’ont mieux été étudiées que celles là. On les connaît parfaitement (structure primaire, étude de toxicité, d’allergénicité, etc).

Les préparations de Bacille de Thuringe correspondent la plupart du temps à un mélange de plusieurs toxines dont on connaît mal la composition, la teneur respective de telle ou telle toxine présente, des autres toxines (CYT), aucune étude d’interactivité etc… mais qui sont, par contre, autorisées depuis des décennies tant en culture conventionnelle qu’en culture selon le mode AB (fait partie des « insecticides » permis en AB, et l’AB ne s’en prive pas !).

Philippe Joudrier, Docteur d’Etat en biologie a été directeur de recherche à l’INRA où il se consacra à des travaux de recherche en biochimie et biologie moléculaire des céréales. Expert au sein du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France (CSHPF) puis au sein de l’AFSSA, il a présidé de 2006 à 2009, le comité d’experts spécialisé en Biotechnologie, chargé de l’évaluation des OGM. Il fait actuellement partie des en France du CSBT (Comité de Surveillance Biologique du Territoire) et au niveau européen du comité “Food Enzymes” au sein de l’AESA (EFSA). IL a publié ” OGM : Pas de quoi avoir peur !” Ed. Le Publieur, 2010)

Références pour les informations contenus dans l’entretien ci-dessus :

-Référence : voir le rapport récent de l’OPECST : Pesticides et santé. C. Gatignol (député) et JC Etienne (Sénateur), 29/04/2010.

Les publications de B. Ames (1990, PNAS) qui font comprendre que le concept de « plantes à pesticides » ou « plantes pesticides » qui a été appliqué spécifiquement aux PGM est totalement ridicule. Tous les organismes vivants sont pesticides contre l’un ou l’autre de leurs prédateurs ! (y compris l’homme évidemment). De très nombreux de ces pesticides naturellement contenus dans les organismes sont des protéines !

Il fait aussi comprendre qu’un grand nombre de substances naturelles contenues dans les plantes (ou les organismes vivants) sont des mutagènes (et donc cancérogènes potentiels) ou des toxines.

Ames BN and Gold LS, 1990. Misconceptions on Pollution and the Causes of Cancer.

Ames BN, Profet M and Gold LS, 1990. Dietary pesticides (99,99% all natural). Proc. Natl. Acad. Sci., (USA), vol 87, p. 7777-7781.

Ames BN, Profet M and Gold LS, 1990. Nature’s chemical and synthetic chemicals : comparative toxicology. Proc. Natl. Acad. Sci., (USA), vol 87, p.7782-7786.

1) Graham Brookes, Peter Barfoot, 2009. GM crops : global social-economic and environmental impacts 1996-2007. Dorchester UK May 2009 PG economics Ltd UK

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