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Le CO2, molécule idéale pour stocker l’électricité verte ?

Le CO2 peut être la molécule idéale pour stocker l’électricité d’origine renouvelable. C’est ce que pense Elsje Alessandra Quadrelli, directrice de recherche au CNRS, chercheuse à l’Institut de recherche sur la catalyse et l’environnement de Lyon (Ircelyon) et titulaire de la chaire de développement durable CPE Lyon –École adhérente au pôle de compétitivité Axelera.

Alexandra Quadrelli : le CO2 est le problème, il peut être la solution ( photo Alexandra Quadrelli)
Dr. Elsje Alessandra Quadrelli : le CO2 est le problème, il peut être la solution. ©Alexandra Quadrelli

Les émissions mondiales de CO2 ont augmenté de 67 % entre 1790 et 2018. Pour le meilleur et pour le pire. Aujourd’hui sa concentration dans l’atmosphère est record. Et si nous gardions le meilleur ? Le CO2, porte battante entre chimie et énergie, peut-il devenir une molécule idéale pour stocker des énergies renouvelables ?

La révolution industrielle a permis un essor économique et sociétal important. Les énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz naturel) ont été des composantes essentielles de ce développement. Et l’industrie chimique, sans laquelle les progrès n’auraient pas été aussi importants, a été et est encore grandement tributaire de ces énergies fossiles.

Ces émissions anthropiques de gaz à effet de serre, responsables du réchauffement climatique, vont devenir peu à peu une préoccupation par leurs conséquences potentiellement néfastes sur l’économie, la société et l’environnement. Selon l’ONU, le ralentissement industriel dû à la pandémie de Covid-19 n’a pas freiné l’augmentation des concentrations de CO2, le principal gaz à effet de serre persistant dans l’atmosphère.

Aider le cycle naturel du carbone

Les cycles naturels enlèvent la moitié du CO2 émis industriellement mais la partie non « recaptée » est suffisante pour déstabiliser le climat. Comment aider ce cycle naturel en ajoutant des cycles de carbonations rapides ?

Des solutions ont émergé comme le captage et le stockage du CO2, par récupération du CO2 des fumées industrielles, le compression, transport et le stockage géologique. En plus de ce stockage géologique, la solution du stockage chimique existe aussi avec, à la clé, la synthèse de produits à haute valeur ajoutée. Voici un exemple à haut potentiel : la collaboration entre Lafarge-Holcim et la start-up américaine Solidia Technologies pour industrialiser une technologie qui produit du béton préfabriqué en utilisant du CO2 capté.

Autre exemple : les matériaux de construction de Carbon 8 Systems issus de la réaction entre CO2 capté d’émissions industrielles et de résidus industriels dont des mâchefers. La jeune pousse française Mecaware propose une technologie pour industrialiser le recyclage des métaux rares basée sur le captage de CO2.

Produire des carburants non fossiles

Mais du point de vue du cycle du CO2, ce sont des solutions de remédiation en bout de chaine et, sans autres changement, l’échelle est rédhibitoire : comment stocker chaque année chimiquement ou sous terre les 20 Gigatonnes de CO2 prévues si on ne réduit pas sa source primaire ? La gestion du déchet n’est plus suffisante : la seconde révolution doit être verte pour réussir à produire des carburants non-fossiles.

Pour baisser les émissions de CO2 à la source, ce sont des énergies alternatives que nous devons utiliser. Mais les énergies renouvelables ont des variabilités saisonnières et géographiques et donc un problème de compatibilité immédiate avec nos systèmes de production qui ne suivent pas ce même cycle.

La chimie devient, dans le cadre de la transition énergétique, une des clés possibles pour stocker et déstocker ces nouvelles sources d’énergies. Le CO2, porte battante entre chimie et énergie, devient une molécule potentielle idéale pour stocker les énergies renouvelables. La chimie n’est alors plus tributaire du secteur de l’énergie, mais sujet de la « création » de carburants à partir d’énergies renouvelables. Trouver des molécules vectrices d’énergies renouvelables et les procédés associés (électrochimie, photochimie, solaire thermiques,…) capables de donner des carburants liquides (transportables et stockables) est le cœur de la révolution copernicienne au sein de l’énergie.

Conversion de CO2 en méthane

Le CO2 est une molécule vectrice, avec à la clé une « économie au méthanol » popularisée par le prix Nobel de chimie George Olah. Cette vision de la chimie du CO2 pour stocker des énergies renouvelables est déjà à l’œuvre. La conversion de CO2 en méthane, alimenté par des énergies renouvelables, est au cœur de la stratégie de e-mobilité du fabricant automobile Audi avec le projet de Audi A3 g-tron qui convertit le CO2 en méthane par réaction chimique avec l’hydrogène, idéalement issu de la filière verte. Ce stockage d’énergie renouvelable encore plus direct est issu depuis peu des travaux de l’équipe du Pr. Robert du laboratoire de recherche académique Lem de l’université de Paris, qui réussit à convertir le CO2 en méthane avec la lumière comme source d’énergie. À grande échelle, la société islandaise Carbon Recycling International produit du méthanol à partir de CO2 sans émettre les quantités de CO2 normalement associés à cette production.

Il est important de noter qu’il y a évidemment un décalage entre le niveau de déploiement actuel de ces procédés alternatifs aux fossiles, encore embryonnaires pour certains aspects, versus les quantités en jeu nécessaires, qui sont, elles, massives. Cependant, quand on veut s’inscrire dans une révolution copernicienne on ne peut pas prétendre que ces solutions profondément en rupture avec l’existant aient la même maturité technologique ou la même rentabilité économique qu’une solution basée sur la correction de l’existant. Mais il y a un potentiel tel que cela fait sens d’investir pour combler ce décalage.

 

Dr. Elsje Alessandra Quadrelli est directrice de recherche CNRS (UMR 5256 « Ircelyon  » équipe ING) à l’institut de recherche sur la catalyse et l’environnement de Lyon et titulaire de la chaire de développement Durable CPE Lyon depuis 2009. Dans ce cadre elle enseigne et mène des recherches autour de la catalyse assistée pour la réduction de petites molécules d’intérêt pour l’utilisation d’énergies renouvelables. L’École d’Ingénieurs en Chimie et Sciences du Numérique CPE Lyon fait partie du conseil d’administration d’Axelera et en est adhérente.

 

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