Le programme de recherche international Iper-Retro1 (Impact des perturbations sur les réseaux trophiques en lacs : approche paléo-écologique), financé par l’ANR, a permis de préciser les causes de l’évolution du fonctionnement des lacs périalpins observée sur les dernières décennies, et de mieux cerner l’influence de l’activité humaine locale par rapport à celle du changement climatique. Les trois lacs du Léman, d’Annecy et du Bourget ont été choisis spécifiquement, car ils sont sous la même influence climatique, qu’ils subissent des activités humaines locales similaires (apports en nutriments et pratiques de gestion de la pêche), mais qui ont fait l’objet de gestions différentes.
Etude des sédiments
Les chercheurs ont mis en œuvre des méthodes de paléo-limnologie, c’est-à-dire l’étude des sédiments qui se déposent au fond des lacs, afin de reconstruire l’évolution des écosystèmes. Les conclusions montrent qu’ils n’y répondent ni de la même façon, ni avec la même intensité. Ainsi, au même titre que nous ne sommes pas tous, en fonction de notre condition physique, également touchés par la grippe lors des vagues virales hivernales, les lacs ne sont pas tous identiquement vulnérables face au changement climatique.
La prolifération d’algues influence la vulnérabilité des lacs
Parmi les nombreux résultats obtenus, les chercheurs ont identifié plusieurs éléments déterminants pour la « santé » des lacs. Ces trois lacs ont subi des proliférations massives d’algues dans les années 1970 et 1980 suite à des apports non contrôlés de phosphore issus des rejets domestiques d’eaux usées. Si les concentrations en phosphore sont à présents contrôlées et en forte diminution dans les trois lacs, les résultats montrent que cette histoire a rendu les lacs vulnérables au changement climatique récent. De l’autre côté de la chaîne alimentaire, la gestion piscicole (tailles de capture des poissons ou pratiques d’alevinage) influence aussi la vulnérabilité et les réponses du plancton à l’augmentation de la température.
Une gestion durable des milieux
Ces résultats ouvrent ainsi des pistes pour atténuer les effets du changement climatique sur les grands lacs périalpins et pour avancer vers une gestion toujours plus durable de ces milieux privilégiés. Certains des impacts humains sur les lacs peuvent être minimisés localement, moyennant des mesures de gestion appropriées, telles que le traitement des eaux usées, la régulation de la pêche ou la restauration des cours d’eau tributaires de ces lacs.
La fin du programme de recherche a donné lieu à une journée de restitution des résultats le 6 juin 2013 à Chambéry, au cours de laquelle chercheurs et acteurs locaux ont pu échanger sur les solutions envisageables et sociologiquement acceptables.
Pour en saoir plus : www7.inra.fr/iper_retro
1 Le programme Iper-Retro implique la collaboration du Centre Alpin de Recherche sur les Réseaux Trophiques des Ecosystèmes limniques (Inra/Université de Savoie), du laboratoire Environnements, DYnamiques et TErritoires de la Montagne (CNRS/Université de Savoie), du Centre européen de Recherche et d’Enseignement de Géosciences de l’Environnement (CNRS/Université Aix-Marseille/IRD), du Laboratoire souterrain de Modane (CNRS/CEA/Université de Versailles Saint-Quentin), du laboratoire Chrono-environnement (Inra/CNRS/Université de Franche-Comté) et du CNR-Verbania en Italie.