Dans l’enceinte de Minatec, tous les majors de la micro-électronique se pressent. Il n’y a pas que les grenoblois STMicroelectronics ou Soïtec, le Leti et ses salles blanches, mais aussi les ténors de l’industrie et de la recherche européenne, le géant belge Umicore1, le groupe médical italien Sorin, l’Institut Fraunhofer ISE de Freiburg (le CEA Allemand). Tous sont venus pour le sommet ministériel européen consacré au KETs.
Parmi ces technologies, le groupe d’experts de haut niveau (GHN)2 créé à Bruxelles en juillet 2010 et piloté par Jean Therme, directeur de la Recherche technologique du CEA, a désigné six KETs prioritaires : la nanotechnologie, la micro et nano-électronique, les matériaux avancés, la photonique, la biotechnologie industrielle et les systèmes de production avancés.
Une « vallée de la mort » entre recherche fondamentale et production industrielle
« Les Européens sont à la pointe en matière de recherche fondamentale, la difficulté est de la transformer en produits commercialisables, explique Jean Therme. Il existe une véritable vallée de la mort entre la science et le marché ». Pour la franchir à la tête du GHN, il propose une stratégie s’appuyant sur trois piliers :
– Un pilier centré, sur la recherche technologique,
– La création d’une ligne pilote, en partenariat avec des industriels et servant de démonstrateur,
– Le passage à la production industrielle de masse.
Ce concept de pont à trois piliers, le GHN préconise à l’UE de l’appliquer dans toutes ses unités de Recherche.
Des matériaux aux produits et services, une intégration verticale
Dans chacun des exemples qui seront commentés pour les visiteurs, celui de l’optimisation des batteries de véhicules électriques, celui des smartphones, celui des cellules photovoltaïques ou de la miniaturisation des stimulateurs cardiaques, dans chacune de ces applications, les TEKs constituent la base de la chaine de valeur. Les maîtriser et franchir les étapes du pont de la chaine d’innovation, c’est maîtriser au final la production industrielle des composants et des produits finis.
Un enjeu industriel et social
Reprise par ses collègues et le vice-président de la Commission européenne, la ministre française Geneviève Fioraso énonce clairement les enjeux : « Il faut faire en sorte que la Recherche se transforme en emplois. Si on ne maintient pas ce noyau de compétitivité, nous perdrons l’amont (la recherche) et l’aval (l’industrie) ». Pour cela elle détaille plusieurs nécessités : être interdisciplinaire, avec des équipes internationales, sans protectionnisme, mais réalisme, avec une stratégie européenne et volontariste.
Aider au franchissement des étapes
Rappelant comment on était passé en cinq ans de Nokia, aujourd’hui dépassé, à Samsung, qui maîtrise toute la chaine technologique, Jean Therme insiste sur l’obligation d’intégrer la totalité de la chaine de valeur. Il faut en particulier, dit-il « que l’étape intermédiaire de la ligne pilote, celle du démonstrateur, soit assistée par les Etats et l’Europe ». Ce risque est trop lourd à porter par les industriels seuls.
Enfin, renouvelé dans sa mission, le groupe d’experts de haut niveau va maintenant se pencher sur les outils financiers au sein de l’Europe et les politiques de réciprocité à mettre en place avec des partenaires extérieurs.
1 Umicore, groupe belge de 15 000 personnes, spécialisé dans la technologie des matériaux, vient d’être classé premier selon l’index de Corporate Knights « Global 100 des entreprises les plus durables du monde ».
2 Le Groupe d’experts de Haut Niveau (GHN), présidé par Jean Therme est constitué de 27 membres des Etats membres, de l’industrie européenne, des instituts de recherche et de la BPI.
