Pierre Rabhi, pionnier de l’agroécologie et de la sobriété heureuse, n’est plus

Pionnier de l’écologie et de l’agroécologie, mais aussi penseur de la sobriété heureuse, essayiste, conférencier, fondateur entre autres du mouvement Colibris, Pierre Rabhi est décédé le samedi 4 décembre à Lyon, à l’âge de 82 ans, des suites d’une hémorragie cérébrale.

Pionnier de l’écologie et de l’agroécologie, mais aussi penseur de la sobriété heureuse, essayiste, conférencier, fondateur entre autres du mouvement Colibris, Pierre Rabhi est décédé le samedi 4 décembre à Lyon, à l’âge de 82 ans. ©Bruno Lamothe

C’est avec tristesse qu’a été reçue pendant la fin de semaine, la disparition de Pierre Rabhi, un sage, sur qui le temps ne semblait pas avoir de prise. Fort de ses convictions, modeste, discret, empathique, à la fois terrien pratique, moraliste et philosophe, Pierre Rabhi a depuis un demi-siècle tracé un sillon de rigueur, d’honnêteté, et de générosité.

Néé le 29 mai 1938 à Kenadsa en Algérie, sa mère meurt de tuberculose alors qu’il est encore jeune enfant. Son père, forgeron, musicien et poète, le confie à l’âge de cinq ans à un couple de Français, un ingénieur gaulliste et une institutrice, venus travailler dans les houillères du Sud Oranais dans son village natal.

Avec ses parents d’adoption, Pierre Rabhi quitte Kenadsa pour Oran, où il suit deux années d’études secondaires. Il se convertit au christianisme, demande à être baptisé et prend comme prénom de baptême Pierre. Lorsque la guerre d’Algérie éclate, il affirme suivre les idées de sa famille, hostile à l’Indépendance algérienne et favorable au maintien de l’Algérie française. Fervent catholique, Pierre Rabhi au fil des ans ne se sent appartenir à aucune église. « À mesure que j’avance dans la vie, l’affirmation que seul l’amour peut changer le cours de l’Histoire me saisit de plus en plus par sa vérité, son évidence », avait-il déclaré en 2016.

Départ pour les Cévennes

Arrivé à Paris, il trouve un emploi de magasinier chez un constructeur de machines agricoles. Il rencontre Michèle qui sera son épouse. Les deux jeunes mariés veulent s’extraire de leur vie urbaine et pensent à l’agriculture. Ils rencontrent le docteur Pierre Richard, un médecin écologiste et conservateur partisan du « retour à la terre », qui travaille à la création du Parc national des Cévennes. Richard encourage le couple qui s’installe en Ardèche définitivement en 1960, précédant le mouvement néorural de la fin des années 1960. Pierre Rabhi, sans aucune connaissance agricole, s’inscrit dans une Maison familiale rurale.

Pierre Rabhi, rencontre ausssi Gustave Thibon, poète et philosophe chrétien et conservateur. Rabhi découvre et adhère aux idées de Rudolf Steiner, ainsi qu’aux principes de l’anthroposophie, notamment à la biodynamie.

Formateur en agroécologie

En 1963 dans les Cévennes ardéchoises, il se lance dans l’élevage caprin et veut rejeter les modèles de productivisme, en expérimentant l’agriculture biodynamique. En 1978, l’exploitation familiale est devenue rentable. Pierre Rabhi a acquis une solide expérience. Il est chargé de formation en agroécologie par le Cefra (Centre d’étude et de formation rurales appliquées).

À partir de 1981, l’éleveur ardéchois retrouve l’Afrique. Il se rend au Burkina Faso en tant que « paysan sans frontières » à la demande du gouvernement de Ouagadougou, avec le soutien du Centre de relations internationales entre agriculteurs pour le développement (Criad). En 1985, il crée un centre de formation en agroécologie à Gorom-Gorom, le premier du continent.

Création d’associations et publications

En 1988, il fonde le Carrefour international d’échanges de pratiques appliquées au développement (Ciepad) avec l’appui du conseil général de l’Hérault. Il crée un « module optimisé d’installation agricole », des programmes de sensibilisation et de formation, et de nombreuses actions de développement à l’étranger En 1992, il lance le programme de réhabilitation de l’oasis de Chenini-Gabès en Tunisie. Depuis 1994, il anime le mouvement Oasis en tous lieux, promouvant le retour à une terre nourricière et la reconstitution du lien social.

En parallèle, il publie plusieurs livres faisant l’éloge de la sobriété heureuse vue comme une façon d’aller vers l’essentiel, voire d’accéder au bonheur. Il fonde l’association Les Amis de Pierre Rabhi, devenue en 1994 Terre & Humanisme. Elle a pour objet la promotion et la transmission de l’agroécologie. En 1997 et 1998, il participe à l’élaboration de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (CLD, ou CNULCD)..De 1999 à 2001, il lance des actions de développement au Niger et au Mali.

Associations, conférences, ateliers

En 2002, il crée le « Mouvement appel pour une insurrection des consciences » (Mapic) afin de se présenter à l’élection présidentielle mais n’obtient que 184 parrainages sur les 500 requis. Il crée avec Michel Valentin en 2004 Les Amanins à La Roche-sur-Grane, dans la Drôme. Cette infrastructure d’agrotourisme maraîcher accueille des séminaires d’entreprise, des vacanciers et des personnes en formation au maraîchage.

Pierre Rabhi déploie une intense activité, anime conférences et des ateliers sur la simplicité volontaire et la décroissance. Considéré comme artisan de l’altermondialisme, il est invité lors du Forum social européen, et intitule un de ses exposés « Donner une âme à la mondialisation ». Il crée en 2007, avec Isabelle Desplats, Cyril Dion et quelques autres, le mouvement Colibris. L’objectif est « d’inspirer, relier et soutenir tous ceux qui participent à construire un nouveau projet de société ». Il a fait partie du comité éditorial du mensuel français La Décroissance et est vice-président de l’association Kokopelli qui œuvre à la protection de la biodiversité (à la production et à la distribution de semences issues de l’agriculture biologique et biodynamique) et à la régénération des sols cultivés. Il a créé une fondation qui était sous la tutelle de la Fondation de France. Elle est depuis devenue un fonds de dotation. Le 1er février 2017, il reçoit des mains d’Anne Hidalgo la médaille Grand Vermeil de la ville de Paris.

Michel Deprost, à partir notamment des éléments de l’encyclopédie participative Wikipedia.

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