Parcours de santé aménagé sur des stériles, parking, scierie à Saint Priest La Prugne construits sur des déchets, routes tracées sur des remblais généreusement donné par COGEMA, pire, lotissement ou plan d’eau de loisirs installés sur ou près de zones remplies de déchets : l’émission de la chaîne publique France 3 a ouvert ce mercredi (à une heure grand public) le dossier des déchets miniers.
Un dossier parfois enfoui, en tous les cas géré sans assez de précaution, avec parfois négligence par l’exploitant minier, et souvent par l’Etat lui-même, ses services ou des autorités chargées d’assurer sécuritésanitaire du public.
L’émission-enquête a rappelé les conditions d’exploitations des mines d’uranium dans divers secteurs du Massif Central, en Saône et Loire près de Gueugnon, dans la Loire, dans le Cantal, dans l’Allier en Haute Vienne. Les conditions de travail pour les mineurs étaient telles que des études de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) ont démontré un surcroit de cancers chez ces travailleurs.
Mémoire du risque
L’enquête a aussi montré comment le traitement des déchets a surtout consisté en un traitement paysager destiné à faire oublier l’activité et ses dangers, alors qu’une gestion responsable aurait dû consister à conserver la mémoire du risque.
Etangs remplis de sédiments contaminés, anciennes carrières ayant reçu des fûts de minerai, terrains à peine enclos, barrières de protection ouvertes sans difficultés : la gestion des déchets semble avoir été plutôt banalisée. La responsabilité aurait dû consister à informeren permanence, sans affoler.
André Claude Lacoste, président de l’Autorité de Sûreté Nucléaire, patron de l’ASN depuis 16 ans, a reconnu que la priorité avait été donnée aux déchets des centrales, les déchets miniers étant traités avec un degré moindre de vigilance, en raison du plus faible risque qu’ils représentent. Pour lui, il n’existe actuellement pas de risque qui justifie des mesures urgentes.
Rapports écartés
Michèle Rivasi, ancienne députée (aujourd’hui tête de liste des Verts pour la région centre est) et Corinne Lepage, ancienne ministre de l’Environnement ont rappelé comment le lobby nucléaire infiltre certains corps de l’Etat au point de faire perdre leur indépendance à certains services de contrôle. Plusieurs rapports concernant les déchets ont été mis de côté.
L’enquête a rappelé que certains contrôles des activités d’AREVA sont ainsi réalisés par une ancienne filiale. Une séquence a montré que les compteurs de bien des sites sont installés sur les points où les émissions sont les plus faibles. Divers témoignages ont rappelé que les mesures ne sont pas assez réalisées par des organismes indépendants.
“Pièces à conviction” a suivi le travail de la CRI-RAD ( Valence) et de son spécialiste, Bruno Chareyron, sur le terrain et dans son laboratoire de Valence, où il a montré la présence de « descendants » de l’uranium eux aussi radioactifs, un point que le député socialiste Christian Bataille, auteur d’une loi sur les déchets radioactifs en 1991 semblait ignorer.
300 millions de tonnes
A raison de 300 millions de tonnes réparties dans 25 départements, les déchets miniers ne représentent pas un risque si le problème est rigoureusement repris en main, y compris au niveau de l’information des habitants et des élus. Terrains à clôturer, zones à interdire, signalisation, travaux de dépollution, surveillance des point les plus critiques, protection de cours d’eau, de certaines habitations, information des habitants, des élus, contrôles indépendants, suivi sanitaire: les déchets miniers ne sont pas un dossier clos, à fortiori à l’heure où le secteur nucléaire affiche son redémarrage.
Le groupe AREVA, propriétaire de l’ancienne COGEMA, est normalement invité à prendre en charge une bonne part de cette gestion. Le coût n’en semble pas exorbitant, en tous les cas pas de hors des moyens d’une société que le reportage a qualifiée de multinationale alors qu’AREVA n’est pas du tout une multinationale. AREVA est bien détenue par les capitaux publics français, par l’Etat. Raison de plus, assurément, pour que le dossier déchets ne soit pas oublié.