« Nous sommes dans la troisième révolution industrielle, après la vapeur, l’électricité, nous sommes dans le numérique. Comme la presse est née de la deuxième révolution industrielle avec la rotative importée des Etats Unis, la presse doit surmonter les défis de cette révolution industrielle et retrouver sa fonction dans la démocratie». Edwy Plenel, directeur du site d’Information Mediapart a ainsi, en substance, résumé les défis qui se présentent devant le journalisme, une profession malmenée, en proie à une crise multiple, professionnelle, économique.
Le Club de la Presse de la Drôme avait organisé ce jeudi à Valence une réunion sur la presse en ligne, à laquelle participait Edwy Plenel, directeur de Médiapart, Christophe Gueugneau du Nouvel Observateur.fr et Cyril Lehembre Nouer ,de Drome Hebdo, site internet de l’hebdomadaire drômois du même nom, lancé à la fin de l’année 2008. Louisette Gouverne, journaliste dans la Drôme, a animé les échanges auxquels a assisté un public nombreux, signe que l’avenir de l’information préoccupe l’opinion.
Les trois participants ont présenté le site dont ils sont responsables et fait découvrir au public quelques principes du fonctionnement du journalisme sur Internet. Edwy Plenel a donné des détails sur la fonction de Médiapart, le site le plus avancé sans doute dans la recherche d’un nouveau modèle économique.
Limites de la gratuité
Il a longuement expliqué les limites de la gratuité, qui a tendu à s’imposer comme le modèle dominant, voire unique sur Internet. La prise en charge d’une partie du coût de l’information par la publicité n’est pas nouvelle, c’est sur ce modèle que la presse sur papier s’est même développée. « Il y a même eu des journaux sur papier gratuits, comme le Soir, en Belgique» rappelle le directeur de Médiapart.
Mais la gratuité, c’est-à-dire la prise en charge par la publicité ne permet pas d’assurer la qualité des contenus sur quoi se fait la différence. Les meilleurs médias, les médias économiques, vendent sans difficulté leur contenu qui doit être de qualité et utile. La qualité des contenus reste quand même la demande des lecteurs. « Le modèle gratuit sur le papier est en train d’exploser, le groupe Métro est à vendre et 20 minutes ferme des éditions» rappelle Edwy Plenel.
Le modèle qui pourrait être dominant , dans le cadre d’un financement par la seule publicité, entraîne une course vers une audience de plus en plus large. Cette course à l’audience publicitaire a des conséquences très claires. Des technologies de plus en plus sophistiquées traquent la fréquentation des sites, la manière dont les internautes regardent la publicité. La course à l’audience entraine aussi des surenchères en matière de fréquentation, une guerre des statistiques, des concentrations économiques par rachat de site, afin de concentrer les chiffres d’affaires. Car le marché de la publicité se concentre lui aussi sur les principaux sites qui revendiquent plusieurs millions de visiteurs. La publicité sur Internet rémunère sensiblement moins que la publicité sur papier, non seulement en raison de l’abaissement des coûts de fabrication, mais aussi en raison de la possibilité pour l’annonceur de traquer le lecteur à l’unité.
Cette course à l’audience remet évidemment en cause la pluralisme de l’information à tous les niveaux, au niveau national comme au niveau régional ou local.
La participation financière des lecteurs n’est donc pas un modèle impossible, loin de là. Il convient d’imaginer des modes de paiement, des modes d’abonnements, des services pour faire venir les lecteurs, pour les fidéliser. Le lecteur qui entre sur un site doit savoir qu’il entre dans un espace de confiance, et en même dans un espace riche de potentialité. Un site internet d’information est en effet une plate-forme d’une richesse immense qu’il faut savoir proposer au lecteur afin qu’il bénéficie des archives, des documents, des possibilités de forum, de création de blogs. C’est sur cette voie qu’Enviscope, s’es engagé.
1) Michel Deprost, d’Enviscope a témoigné que certains publicité pouvaient ne rapporter que quelques centimes d’euros, bien qu’elles soient vues par des milliers de lecteurs.
.
