Comment voyez-vous les marchés de l’énergie photovoltaïque ? Le marché européen du photovoltaïque fonctionne très largement avec des incitations fiscales des Etats et des tarifs d’achat très attractifs. Les tarifs d’achat proposés en France sont les plus intéressants, mais le système est le même en Allemagne, en Espagne, en Italie, en Grèce. Aux Etats Unis, le système repose sur des taxes. En Chine l’incitation pour le décollage du marché est mixte. Tout cela est pratiqué pendant les deux ou trois ans qui sont nécessaires au décollage du marché, le temps que tous les acteurs se mettent en place. L’Europe est pour nous actuellement le marché le plus attractif, en particulier l’Allemagne, où nous réalisons la moitié de nos ventes, 30% de nos ventes étant réalisées sur le reste de l’Europe, 10% aux Etats Unis et 10% seulement en Chine où le marché est très récent. Mais le marché chinois va se développer.
Les critiques sont nombreuses qui visent les produits fabriqués en Chine. Elles portent sur les conditions sociales, les conditions de travail, les conditions environnementales, que répondez-vous ? La Chine est l’atelier du monde. Que ce soit pour les ordinateurs, des appareils ménagers, des téléphones, une bonne partie de ce que nous consommons vient de Chine et les plus grandes marques mondiales font fabriquer en Chine. Elles garantissent la qualité des produits chinois. La difficulté de YINGLI tient au fait que nous ne sommes pas une grande marque mondiale, nous sommes une marque chinoise et nous avons travaillé dur, nous devons travailler dur, pour faire reconnaitre notre marque et démontrer que nous produisons des produits de qualité dans des conditions socialement et environnementalement positives.
Comment produisez vous ?
Nos usines bénéficient de nombreuses certifications, par exemple de la certification ISO 9001 pour la qualité, de la certification ISO 14001 pour le management de l’environnement. Nous bénéficions aussi d’audits quant aux aspects sociaux de notre activité comme la certification SA 8000 (Social Accountability) sur l’UN Universal Déclaration des droits de l’homme, Convention des droits de l’enfant et diverses conventions internationales de l’Organisation du travail. Yingli bénéficie aussi de la certification ISO18001 : Système de management de la santé et la sécurité. Nous n’employons évidemment pas d’enfants ! Et nos produits eux-mêmes sont contrôlés grâce à une coopération avec l’organisme allemand de certification TÜV, bien connu, qui certifie l’énergie qui peut être produite par nos panneaux.
La reconnaissance de la qualité est aussi administrée par le marché mondial. Ce dernier a progressé de 25% en 2009, alors que nos propres ventes ont bondi de 85%. En France même, Gaz de France Suez a choisi des panneaux YINGLI pour réaliser la future centrale de Curbans, qui sera le plus grande centrale photovoltaïque de France, avant même d’avoir choisi l’entreprise espagnole Maetel, qui va concevoir et réaliser le projet. Le photovoltaïque est aussi pour les producteurs d’énergie, un moyen de disposer d’un bouquet de technologies pour proposer une offre complète et équilibrée.
Les critiques évoquent aussi l’empreinte carbone de vos panneaux ? La fabrication de panneaux comprend cinq étapes, sans parler de l’étape qui consiste à apporter les panneaux sur le chantier : la production du silicium, la production des lingots, la production des wafers, celles de modules et celles des panneaux. Chez tous les fabricants, ces différentes étapes sont elles-mêmes l’occasion de nombreux transports, d’un point à l »’autre de la chaine. Le silicium voyage, les lingots voyagent d’un pays à l’autre, parfois d’un continent à l’autre. YINGLI peut mettre en avant que la fabrication y est intégrée sur un seul lieu de production, ce qui réduit l’empreinte environnementale ! Et puis, il ne faut pas oublier que les panneaux ne sont qu’un élément parmi d’autres, à côté des câbles, des onduleurs !
La fabrication en Chine ne constitue-t-elle pas une domination sur le secteur ? De nombreux éléments sont produits en Europe et nous-mêmes nous achetons une grande partie de nos équipements industriels en Europe, en Allemagne, en Hollande, en Suisse, en Italie, il s’agit plus particulièrement des fours à fusion de GT SOLAR, des lignes de production de wafers et de cellules de Roth & Rau, Manz Automation et Baccini. Il faut bien reconnaitre que nous en achetons peu en France car la France a du retard dans le domaine du photovoltaïque.
Que pensez-vous de la stratégie française ? La France a longtemps subventionné la réalisation d’installations en site isolé, dans les DOMT OM mais n’a pas mené un effort de recherche et développement suffisant sur d’autres applications.
Comment voyez-vous les enjeux technologiques ? L’enjeu pour nous n’est pas de proposer les panneaux les moins chers. Notre objectif est de proposer la solution qui permet de proposer l’énergie la moins chère, dans la durée. Notre objectif est d’abaisser le prix du watt crête et non de rechercher la technologie la plus sophistiquée. Ce n’est pas intéressant d’atteindre un rendement de 25% si le prix est hors du marché. Nous allons proposer un module dont le rendement de la cellule sera de 18,5% au lieu de 16,5% et ce module s’appellera Panda, du nom de l’animal emblématique de la Chine, pour montrer que nous ne nous cachons pas derrière une marque à consonance anglo-saxonne.
Yingli entend donc devenir pleinement une marque chinoise de renommée mondiale ? C’est tout à fait cela. Et nous seront tout à fait visibles dans deux semaines. La Fédération Internationale de Football Association nous a retenus comme sponsors officiels de la Coupe du Monde de Football qui va commencer dans deux semaines en Afrique du Sud. On nous verra au bord des stades, sur les écrans de télévision, et ce n’est pas hasard. La FIFA aurait pu choisir une entreprise de l’éolien, une entreprise de la biomasse, elle a choisi une marque du photovoltaïque car le photovoltaïque est la technique qui permet de mettre à disposition l’énergie la moins chère.
Recueilli par Michel Deprost michel.deprost@enviscope.com