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Contrefaçon: la loi durcit la lutte

La loi renforce la lutte contre la contrefaçon, qui nuit à l’innovation technologique. Les brevets dans les domaines de l’énergie et de l’environnement représentent environ 10% des brevets déposés chaque année. Robin Le Goff, Conseil en Propriété Industrielle, mandataire en brevets Européens et Renaud Chevalier, Associé, Conseil en Propriété Industrielle, mandataire en brevets Européens, expliquent en quoi la loi du 13 mars 2014 renforce la lutte contre la contrefaçon.

Chaque année, les acteurs de l’innovation technologique déposent environ 17.000 brevets français, 61.000 brevets allemands, 150.000 brevets européens et 2,2 millions de brevets dans le reste du monde (données OMPI : WIPI Report 2013). La part des brevets portant sur les technologies liées à l’environnement et aux énergies était d’environ 10% en 2012 et elle augmente chaque année (données OCDE 2011).

Mais cette médaille de l’innovation a un revers coûteux : la contrefaçon. La valeur économique globale de produits contrefaits ou piratés est évaluée à 650 milliards de dollars en 2008 et elle pourrait atteindre 1770 milliards de dollars en 2015 (Rapport BASCAP de la Chambre de Commerce Internationale, basé sur des données OCDE). De plus, les produits contrefaits ou piratés coûteraient plus de 2,5 millions d’emplois aux seuls pays du G20. La contrefaçon affecte notamment les inventions brevetées. »

 Une amélioration de la protection de la propriété intellectuelle

La loi renforçant la lutte contre la contrefaçon est entrée en vigueur le 13 mars 2014 en France. Auparavant, la contrefaçon a souvent été considérée comme lucrative malgré les mesures de réparation. La nouvelle loi va significativement améliorer la protection de la Propriété Intellectuelle en France. En particulier, cette nouvelle loi renforce considérablement les droits des brevetés, notamment en augmentant significativement les dommages et intérêts que devront supporter les contrefacteurs, au moyen des trois mesures suivantes.

Premièrement, la nouvelle loi porte de 3 à 5 ans le délai de prescription des actions en contrefaçon (Article L.615-8 CPI). Concrètement, un breveté sera dédommagé pour tous les actes de contrefaçon commis durant les 5 années, au lieu de 3, qui précédent le début de l’action judiciaire. En pratique, cela équivaut statistiquement à une augmentation de 70% des dommages et intérêts.

Par ailleurs, l’Accord sur le brevet européen unitaire prévoit également un délai de prescription de 5 ans (Article 72), qui pourra donc s’appliquer aux brevets européens ou nationaux dans les pays de l’Union Européenne.

Deuxièmement, lors du calcul des dommages et intérêts (Article L.615-7 CPI), les Tribunaux devront désormais prendre en compte « distinctement » :

– les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner et la perte subis par le breveté,

– le préjudice moral subi par le breveté, et

– les bénéfices réalisés par le contrefacteur.

Cette prise en compte distincte devrait aussi augmenter significativement le montant des dommages et intérêts en cas de contrefaçon. En effet, les juges prendront en compte séparément ces trois motifs, ce qui permettra de cumuler les dommages et intérêts. Par exemple, si les dommages et intérêts résultant des conséquences économiques négatives et des bénéfices indûment réalisés par le contrefacteur sont jugés insuffisants, les juges pourront prononcer des dommages et intérêts importants pour le préjudice moral, en raison par exemple d’une atteinte à l’image et à la réputation du breveté.

Troisièmement, la nouvelle loi ajoute aux bénéfices réalisés par le contrefacteur « les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels » que le contrefacteur aura réalisées grâce à la contrefaçon (Article L.615-7 CPI). Concrètement, ces économies d’investissement peuvent être considérables, car elles incluent des frais de Recherche & Développement et des frais de Marketing supportés par le breveté pour le développement, l’industrialisation et la commercialisation de son invention. En pratique, pour bénéficier pleinement de cette mesure, une société titulaire d’un brevet pourra utilement tenir une comptabilité analytique détaillant les frais de mise au point et de mise en vente de l’invention brevetée.

 

Alternativement au calcul précité des dommages et intérêts, le breveté pourra demander à recevoir, en plus de l’indemnisation de son préjudice moral, une somme forfaitaire supérieure aux royalties qui auraient été dues par le contrefacteur s’il avait conclu un contrat de licence avec le breveté.

 

En conclusion, la nouvelle loi va alourdir les sanctions économiques contre la contrefaçon, ce qui valorisera davantage les brevets. En corollaire, lors du développement ou du lancement d’un nouveau produit ou procédé, chaque entreprise devrait redoubler de prudence afin de s’assurer que ce nouveau produit ou procédé ne risque pas d’être contrefaisant. En pratique, pour évaluer ce risque, il est recommandé de faire une recherche parmi les brevets existants dans le domaine d’activité, en vue de déterminer si le nouveau produit ou procédé est ou non libre d’exploitation. De plus, il est utile de surveiller régulièrement les brevets publiés dans son domaine d’activité.

Robin Le Goff, Conseil en Propriété Industrielle, mandataire en brevets Européens

Renaud Chevalier, Associé, Conseil en Propriété Industrielle, mandataire en brevets Européens

 

 

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